Conscient, inconscient, subconscient et perméabilité

Qu’est-ce qu’un tas de cailloux ? A combien de cailloux peut-on dire qu’un tas est un tas ? Je pointe 100 cailloux entassés les uns sur les autres, est-ce un tas ? J’en enlève 2, est-ce toujours un tas. Il en reste 12, est-ce un tas ? 11 ? 10 ? 9 ? 8 ? Avec 2 cailloux, ce n’est plus un tas. Mais 4, est-ce à nouveau un tas ? Oui ? Non ? Si je pointe 10 cailloux reposant tous sur le sol. Est-ce un tas ? S’ils sont empilés ?

Bienvenue dans ma tête.

Pour reprendre la métaphore du tas de cailloux, j’ai beaucoup de mal avec la frontière séparant nettement un concept de son cousin voir de son opposé. Nous pouvons tous pointer du doigt du noir ou du blanc. Mais mettre la frontière entre le gris clair et le gris foncé devient beaucoup plus subjectif.

A mes yeux la différence entre le conscient et l’inconscient et la même qu’entre un tas de cailloux et quelques cailloux. C’est flou, perméable et changeant en fonction de beaucoup de paramètres.

Toutes fois, je vais tenter de vous apporter des définitions qui correspondent à l’image de ce que je me fais des concepts de ces trois mots. Lorsque je parle de ses mots en séance ou sur ce site, il faut les lire globalement comme suit :

 

Conscient :

Lorsqu’un choix (ou un acte) est conscient, la personne le faisant peut retracer le vecteur de décision qui lui a fait faire ce choix (ou cet acte). Il va pouvoir rationnaliser les raisons, les sensations et avoir l’impression d’un libre arbitre évident.

Vecteur de décision :

Tout comme un vecteur en mathématique, c’est un objet qui possède une origine (ici temporelle), une direction (du sensible vers la pensée puis vers la décision) et un sens (du domaine causal). On peut y retrouver la métaphore du fils de la pensée (en français) ou du train de la pensée (en anglais).

Inconscient :

Le choix (souvent) ou l’acte (parfois) sont inconscient lorsque la personne n’a pas l’impression d’avoir appliqué une forme de volonté. Souvent la personne ne pourra donner d’origine à ce choix ni même savoir quel sens l’a déclenché.

Subconscient :

Je ne sais pas ce que c’est. Dans ma tête c’est la même chose que l’inconscient.

Pendant une séance avec moi, lorsque le volontaire cherche à devenir soumis ou à mieux rentrer dans un rôle, ce qu’il désire c’est inconscientiser ses décisions.  Perdre le contrôle, ce n’est pas être contrôlé, c’est avoir l’illusion de n’avoir plus le choix ou de n’émettre plus aucun choix.

 

Petite parenthèse que je ne me lasserai jamais de répéter :

Je souhaite rajouter aussi la notion de libre-arbitre et de consentement. Lors d’une séance d’hypnose, peut-on perdre le consentement ? Oui. Est-ce normal ? Non.

Comme toute relation avec un ‘’sachant’’ (ici hypnotiseur) et un ‘’apprenant’’ (hypnotisé), le consentement éclairé en pleine conscience n’est pas forcément évident. Il suffit de voir les soucis dans le milieu médical (par exemple) pour s’en rendre compte.

J’ai à cœur dans ma pratique le consentement, quitte à y perdre un peu de spontanéité et à casser le jeu, je préfère toujours poser la question : « Tu es d’accord ? »

Et l’hypnotisé (ou le soumis ou le drone ou le chien…) ne doit pas hésiter à dire « non ».

Je referme la parenthèse

 

 

Pendant une séance, je vais dissocier le conscient de l’inconscient. C’est-à-dire que je vais prétendre parler à deux entités distinctes qui sont pourtant un seul et même tout. (Un peu comme le tas de cailloux… Je sens que je vais perdre pas mal de monde sur ce sujet…)

Cette façon de faire, qui n’est pas obligatoire, permet de travailler au maximum sur l’inconscientisation des processus mentaux.

Je m’explique. 99.9% des gens qui viennent me voir veulent à minima se sentir contrôlé, guidé par une force irrépressible tout en ayant la possibilité de garder le contrôle. On pourrait y voir un paradoxe mais en fait c’est possible.

Et pour ça, j’utilise la dissociation. Je demande au conscient de devenir spectateur de son inconscient. Et je demande à l’inconscient d’être acteur. Comme, usuellement, celui qui décide et agit semble être le conscient, lorsqu’on inverse les rôles alors le conscient se retrouve à avoir l’illusion de ne plus rien décider.

Je continue. Quand vous avez un réflexe, un geste qui semble venir de nulle part, c’est en fait votre inconscient qui a décidé d’agir en catastrophe. Le geste devient plus rapide et précis car sans le filtre de la rationalisation du conscient. Cet article n’est pas là pour vanter un réflexe. Je tiens juste à signaler que vous effectuez des choix inconscients tout le temps et que le conscient n’en a aucune maîtrise.

Avec l’hypnose, on force, en quelque sorte, à rendre tous les choix réflexes. Ce qui implique qu’ils sont sans filtre rationnel, sans jugement et surtout donne l’illusion de venir de nulle part. En somme on obtient le résultat que tous les fétichistes de l’hypnose et du lâcher prise désirent tant.

La perméabilité intervient à ce moment-là. En fait, des choix ont été faits. Simplement le chemin usuel n’est pas emprunté. Le choix conscient qui a été fait donne l’impression de ne pas l’être car il n’a pas fait le même chemin mental. Le conscient se retrouve alors dans l’illusion du spectateur. Il devient virtuellement l’inconscient de son inconscient. Le conscient devient l’inconscient et vice versa.

L’inversion n’est pas parfaite, elle n’est même pas réelle, elle est juste dans l’illusion de la perte de contrôle. Voilà pourquoi résister est si facile. Votre conscient qui habituellement tient les commandes d’une même ferme depuis des années, lâche temporairement prise et découvre que quelqu’un d’autre peu manipuler les manettes. Mais le conscient est fort et surtout il est taillé pour commander. Reprendre les manettes en une fraction de pensée est donc facile.

D’où l’absence de paradoxe dans le désir de lâcher prise tout en étant vigilant et consentant.

 

Et la perte de contrôle total ?

Relisez l’article vous avez la réponse. C’est possible. Mais la somme de travail et de confiance qu’il faut atteindre est colossale. Même avec l’hypnose (qui permet de prendre beaucoup de raccourcis) il faut penser en années plutôt qu’en heures.

Petit plaisir des yeux